Ces derniers schémas font intervenir une société à l’IS en qualité d’usufruitière, commanditaire ou propriétaire de parts de SCI titulaire de droits spécifiques et une ou des personnes physiques généralement associés de la société à l’IS.
Cependant, il est important de s’assurer du respect de certaines contraintes afin d’éviter des déconvenues fiscales.
Généralement, ces contraintes concernent :
- à la correcte valorisation des droits acquis par chacune des parties prenantes par la perspective de rendement équilibré entre elles ;
- sur des montants non symboliques qui justifient la participation de la société à l’IS, qui devra in fine percevoir les bénéfices sur lesquels elle a été imposés ;
- et enfin, bien évidemment, à la justification économique de l’acquisition ou la cession de ces droits.
Certes, le respect de ces contraintes peut rendre le schéma d’acquisition moins favorable pour les personnes physiques (associées de la société usufruitière ou commanditaire) mais elles ont le mérite de relativement sécuriser fiscalement l’opération, qui reste quand même plus intéressante que la SCI à l’IS ou à l’IR.
LA SCI A l’IR OU A l’IS : LE CHOIX ENTRE LA PESTE ET LE CHOLERA
Acquérir des biens immobiliers financés par l’emprunt, compte tenu des taux d’intérêt actuels, malgré leur augmentation ces derniers temps, est un moyen efficace de s’enrichir par la constitution d’un patrimoine immobilier. Mais, le choix des modalités de l’acquisition n’est pas sans conséquences fiscales, qui peuvent dans certaines situations faire obstacle à l’opération.
C’est le cas, lorsque l’acquisition est effectuée par l’intermédiaire d’une SCI à l’IR. Les associés de la SCI sont personnellement imposables à l’IR et aux prélèvements sociaux, sur les revenus fonciers de la SCI. Ils doivent alors payer l’impôt correspondant, sans que la SCI puisse leur verser la trésorerie pour faire face à l’impôt, dès lors que les loyers perçus par la SCI servent à rembourser plutôt l’emprunt bancaire.
Pour éviter cet écueil, la solution évidente est de faire opter la SCI à l’IS, ce qui présente un double avantage :
- D’une part, le revenu imposable sera réduit des frais d’acquisition mais surtout de l’amortissement des biens immobiliers ;
- D’autre part le taux de l’impôt sera réduit à 25% au maximum.
De plus, la problématique de l’imposition des dividendes ne se pose pas, dès lors que la SCI ne disposera pas de trésorerie pour en verser.
Pour autant, la solution de la SCI à l’IS présente toutefois un inconvénient de taille lors de la revente.
En effet, les associés qui veulent appréhender le produit de la vente devront supporter une double imposition pouvant représenter la moitié du prix vente.
La première imposition correspond à l’IS sur la plus-value, qui ne correspond pas à la différence entre le prix d’acquisition et le prix de vente mais à la différence entre la valeur nette comptable du bien immobilier cédé et le prix de vente. Or, la VNC est égale au prix d’achat moins les amortissements déduits.
En conséquence ces amortissements, qui ont permis de minorer la base imposable pendant toute la durée de détention du bien, sont intégralement repris. Si le bien est totalement amorti, à l’exception du prix d’acquisition du terrain, la quasi-totalité du prix de cession sera imposable à l’IS.
La seconde imposition est celle relative à la flat tax sur le produit de la cession. Si les associés de la SCI veulent l’appréhender personnellement, ils devront procéder à une distribution de dividendes correspondant à la plus-value nette de cession majoré des résultats antérieurs qui n’ont pas été distribués. Cette distribution supportera donc la flat tax majorée éventuellement de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.
En tout état de cause, si la SCI n’avait pas opté à l’IS, la vente du bien immobilier aurait bénéficié du régime des plus-values des particuliers avec une plus-value déterminée d’après le prix d’achat majoré d’un forfait de frais d’acquisition de 7,5% et de travaux de 15%, laquelle plus-value serait déduite des abattements pour durée de détention et imposée au taux 36,2%, majorée éventuellement d’une surtaxe de 2 à 6%.
Pour bien illustrer les explications ci-dessus, nous présenterons une comparaison entre la SCI IR et SCI IS pendant la période de remboursement de l’emprunt et à la suite de la vente du bien.
Comparaison SCI IR et SCI IS, pendant la période de remboursement de l'emprunt
Prenons un exemple, d’une acquisition d’un bien immobilier au prix de 1 000 K€, avec un taux de rendement de 6%, soit un loyer net de 60 K€ indexé de 1% par an, financé par emprunt à 100%, au taux de 1,5% sur 20 ans, les associés finançant sur fonds propres les frais d’acquisition de 70 K€.
Prenons également pour hypothèse que le taux d’imposition des associés de la SCI à l’IR est de 30%, ce qui avec les prélèvements sociaux et la déductibilité partielle de la CSG correspond à un taux d’imposition effectif de 45,16%.
Pour déterminer, l’amortissement du bien immobilier, il est considéré que le terrain représente 20% de sa valeur et qu’il est procédé à un amortissement par composant du bâti.
Au vu de la synthèse jointe, il apparait que :
- La trésorerie de la SCI avant impôt est positive de 163 K€ (Loyer net de 1 321 K€ - remboursement bancaire de 1 158 K€).
- Malgré cette trésorerie positive, les associés de la SCI l’IR, compte tenu d’une imposition de 525 K€, devront décaisser 362 K€.
- En revanche, la SCI à l’IS dégagera une trésorerie de 77 K€, après un IS de 86 K€, ce qui après distribution permettra à ses associés de disposer de 54 K€ net de PFU.
La SCI à l’IS est donc la plus intéressante pendant la période de remboursement bancaire.
Vous pouvez vous reporter au tableau ci-dessous retraçant le détail de la comparaison par année des impositions de la SCI à l’IR et à l’IS.


La synthèse est la suivante :

Comparaison SCI IR et SCI IS, à la suite de la vente du bien
Nous avons remarqué plus haut sans surprise, que la SCI à l’IS est beaucoup plus favorable que la SCI à l’IR, lorsque le bien acquis est financé par un emprunt bancaire.
Mais cet avantage disparait s’il est procédé à la vente du bien, pour les raisons exposées ci- après.
En effet, il est considéré, que le bien acquis pour 1 000 K€ est revendu 20 ans plus tard au prix de 1 220 K€, correspondant à une revalorisation de 1% par an, identique à celle du loyer.
Il apparait que dans le cadre de la SCI à l’IR aucune imposition n’est due sur la plus-value, en raison de l’application des forfaits d’acquisition de 7,5% et de 15% pour travaux, qui augmente le prix d’acquisition.
En revanche pour la SCI à l’IS, la plus-value est calculée non d’après le prix d’acquisition mais d’après la VNC, ce qui conduit à reprendre l’ensemble des amortissements antérieurement déduits et génère une première imposition à l’IS et une seconde à l’IR, si le prix de vente est distribué.
Dans l’exemple ci-dessous, la SCI à l’IR s’avère plus favorable, mais dans d’autres cas, la SCI à l’IS peut être plus favorable, mais sans différence significative.
Cependant, bien que la SCI à l’IR soit plus favorable, le TRI dégagé est nettement inférieur à celui de la SCI à l’IS. Ce paradoxe s’explique par le fait que les associés de la SCI à l’IS se sont contenté d’apporter 70 K€ correspondant aux frais d’acquisition et ont même encaissé des dividendes, alors que les associés à la SCI à l’IR ont dû en plus de l’apport initial consentir tous les ans des décaissements supplémentaires pour payer l’IR.
C’est en raison de ces décaissements que la SCI à l’IS doit être retenue, choix qui s’impose lorsque les associés ne peuvent payer l’impôt sur des sommes qu’en pratique, ils ne touchent pas.

LES SOLUTIONS POUR CONJUGUER LES AVANTAGES DE LA SCI A L’IR ET LA SCI A L’IS
Nous avons vu que l’investisseur qui acquiert un bien immobilier avec un financement bancaire pour le louer, devait choisir entre la peste et le choléra, soit :
- Il relève de l’IR et paie de l’impôt sur des sommes qu’il ne touche pas (les loyers servant à rembourser l’emprunt bancaire), pouvant rendre au sens propre l’imposition insupportable ;
- Il opte à l’IS et bénéficie d’une fiscalité plus favorable, mais en cas de vente la moitié du prix de cession environ s’évapore en impôt.
L’idéal est de bénéficier du régime de l’IS lors du remboursement de l’emprunt et de l’IR lors de la revente. Pour arriver à cet objectif, des solutions existent.
La première solution est la location en meublé, qui permet d’amortir le bien et de sortir un résultat proche de zéro tout en bénéficiant du régime des plus-values des particuliers pour le LMNP et de l’exonération des plus-values sous certaines conditions, avec toutefois l’assujettissement aux cotisations SSI sur la plus-value à court terme pour le LMP.
Toutefois par définition, ces dispositions sont réservées pour les locations meublées.
Une autre solution et la plus connue est le démembrement directement du bien ou des parts sociales de SCI, les autres étant liées à l’acquisition à travers une société en commandite simple ou une SCI avec des catégories de parts sociales bénéficiant de droits différents.
Ces derniers schémas ont en commun d’imposer :
- à l’IS le résultat de la société propriétaire du bien immobilier pendant la période de détention du bien immobilier qui est généralement au moins égale à celle du remboursement du prêt bancaire
- à l’IR le résultat exceptionnel résultant de la cession du bien immobilier.
Ils ont également en commun des principes à respecter afin d’éviter des redressements fiscaux fondés non seulement sur l’abus de droit mais aussi l’acte anormal de gestion ou la distribution occulte.
Avant d’exposer ces principes à respecter, que j’ai identifiés, je vous exposerai d’abord les caractéristiques principales des différents schémas.
Le démembrement de parts de SCI
Dans le cadre du démembrement de parts de SCI, cette dernière acquiert le bien immobilier en contractant un emprunt bancaire pour financer l’acquisition, et cet emprunt est égal au coût d’acquisition moins les apports en capital ou en compte courant consentis par les associés.
Ainsi, le démembrement de propriété ne porte pas sur le bien immobilier mais sur les parts sociales de la SCI.
L’usufruit, pour une durée fixe de l’ordre de 15 à 20 ans, est alors détenu par une société à l’IS, qui est généralement locataire des locaux. De plus, le nu-propriétaire est une personne physique, qui est souvent également associée de la société usufruitière.
Cette communauté d’intérêt existant entre les intervenants impose de respecter certains principes, qui seront développés ultérieurement.
En effet, la SCI, qui n’a pas opté à l’IS, n’est pas personnellement redevable de l’impôt sur ses résultats, mais ses associés sur son résultat au prorata de leurs droits dans la société.
En cas de démembrement, en fonction des clauses statutaires, l’usufruitier qui a droit au résultat courant est imposable sur ce résultat et le nu-propriétaire qui a droit au résultat exceptionnel est imposable sur la plus-value en cas de cession du bien immobilier.
Or, l’usufruitier étant une société à l’IS, en application de l’article 238 bis K sur CGI, le résultat de la SCI sur lequel il sera imposable sera déterminée d’après les règles d’assiette applicable à l’IS. C’est-à-dire que le résultat de la SCI sera minoré des frais d’acquisition et de l’amortissement du bien immobilier et sera imposé au taux de l’IS.
Cependant, il est à noter que l’usufruitier sera imposable sur le résultat de la SCI, qu’il soit ou non distribué.
Ainsi, pendant toute la durée du démembrement, seul l’usufruitier sera imposable, et le nu-propriétaire ne sera redevable d’aucun impôt sur le revenu lié à sa détention.
A l’expiration du démembrement, le nu-propriétaire devient automatiquement plein propriétaire des parts, sans que cela ne génère d’imposition. Si la SCI procède à la vente du bien immobilier, la plus-value sera imposable au nom de l’ancien nu-propriétaire d’après les règles applicables aux plus-values des particuliers.
En définitive, le nu-propriétaire bénéficie des règles de l’IS pendant toute la durée du démembrement et de celles de la plus-value des particuliers lors de la vente.
Pour bien comprendre le mécanisme du démembrement de parts de SCI, nous allons reprendre les mêmes hypothèses déjà utilisées précédemment, c’est-à-dire une acquisition d’un bien immobilier au prix de 1 000 K€, avec un taux de rendement de 6%, soit un loyer net de 60 K€ indexé de 1% par an.
En effet, la durée du démembrement a été arrêtée à 20 ans, durée égale à celle du prêt bancaire au taux de 1,5%.
L’usufruitier est locataire du bien immobilier acquis par la SCI, le nu-propriétaire détenant la société usufruitière.
De plus, l’apport de la personne physique nu-propriétaire est le même, soit 70 K€, que dans les exemples de la SCI à l’IR et à l’IS, mais le capital de la SCI est de130 K€, donc l’emprunt de la SCI de 940 K€, la personne physique cédant un usufruit temporaire au locataire au prix de 60 K€, qui le finance sur fonds propres.
Il est retenu comme hypothèse que le résultat de la SCI est distribué à l’usufruitier uniquement dans la limite de la trésorerie.
Toutefois, dans la mesure où le nu-propriétaire est également associé de l’usufruitier (par hypothèse à 100%), cette trésorerie après IS est redistribuée au nu-propriétaire.
Or, en application de l’article 13-5 du CGI, le prix de cession de l’usufruit temporaire sera soumis à l’IR et aux prélèvements sociaux.
Il apparait que le nu-propriétaire devenu plein-propriétaire des parts de la SCI n’aura pas à consentir d’efforts financiers autres que l’apport initial de 70 K€, tout en bénéficiant du régime des plus-values des particuliers lors de la revente du bien immobilier.
Ce schéma permet donc de bien bénéficier des avantages de la SCI à l’IS pendant la période de remboursement du prêt et de ceux de la SCI à l’IR lors de la revente et donc de réaliser un gain de 361 K€ par rapport à la SCI à l’IR et 419 K€ par rapport à la SCI à l’IS, comme cela apparait dans la synthèse ci-dessous.

Le détail année par année est le suivant :
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